Home

Textes spirituels

Les Pères

L'Occident

L'Orient

Sainte Photinie

Saint Silouane

P. Sophrony

Ancien Jospeh Hésychatse

P. Aimilanos

 

Grandes religions

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
ç

 Sainte Photinie l'Ermite

Ermite (1860-1928?)

 

- Dis-moi, Photinie, ton esprit a été ravi au cours de la prière, car pour parler comme tu le dis, tu as été,

certainement, digne de l'illumination divine.

 

- Oui, souvent mon esprit est ravi au ciel. Toute pensée de ce monde cesse alors, mon coeur déborde de joie et d'allégresse divines. Le feu de l'amour pour le Christ embrase mon coeur, au point que s'il m'était possible de prendre des ailes, je m'envolerais pour être toujours dans la béatitude des cieux, que David le roi Prophète a contemplée de ses yeux prophétiques ct il s'est écrié: «Qui me donnera les ailes de la colombe, je m'envolerai ct je trouverai le repos ?»

Là-haut est la vraie Vie, là-haut le repos, là-haut la béatitude éternelle, là-haut rayonne la Lumière divine du Père Céleste perçue par les yeux de l'âme dans le coeur. L'ouvrier de la vertu participe, dès ce monde, à la beatitude et il sent cela en lui. Abba Pambo disait que si le ciel et la terre venaient à disparaître, son coeur n'aurait aucune crainte. Qui le faisait parler ainsi? La béatitude qui était en lui. Par la pratique de la vertu, il s'était uni à Dieu, il s'était déifié. Toute crainte, toute amertume avait été bannie de son coeur que comblait l'allégresse divine, la joie spirituelle. «La vertu, dit le divin Chrysostome, unit à Dieu et hérite du royaume des cieux», On participe aux propriétés de celui auquel on s'unit. Voilà comment l'ouvrier de la vertu participe dès ce monde au bonheur et le sent en lui. Par contre, quand, à cause du péché, la lumière cesse de briller dans l'âme, il y a alors tristesse, affliction, gémissements, pleurs, crainte, ténèbres. J'ai connu, quand j'étais encore dans le monde, des hommes qui possédaient richesses, dignités temporelles et autres biens et qui passaient par des moments d'angoisse, de larmes, accablés d'amertume par la vie éphémère à laquelle ils étaient attachés, tremblant devant la maladie, desepérés devant la mort dont la seule évocation les horrifiait. J'en ai connu d'autres qui, à cause de leurs péchés, étaient tombés dans l'épaisse obscurité intellectuelle et qui ne voulaient, à aucun prix, entendre parler de la vie éternelle, de l'immortalité de l'âme; l'idée de la vie éternelle, du Juste Juge, les troublait et les angoissait. Trouble ct angoisse sont le signe de la privation de la grâce divine, les arrhes du malheur éternel, c'est-à­dire de l'enfer. Je dis que si l'homme connaissait son véritable intérêt, il aimerait mieux subir mille morts que de s'écarter de la voie droite tracée par l'Evangile saint et sacré, qui mène à la vie bienheureuse et éternelle.


Puis Photinie se tut. Son coeur débordait d'amour, elle était émue et de ses yeux coulaient des larmes abondantes. Voulant la tirer de son émotion, je lui dis:


- Pendant la prière, quand ton esprit est ravi, que vois-tu?


- Tu m'interroges sur les mystères? Crois-moi, à ce moment-là je ne me trouve plus en ce monde, bien que mon corps soit sur la terre. Je ne vois plus rien de matériel, je ne sens plus rien de terrestre, car mon esprit se trouve dans la Lumière divine où il entend, avec les oreilles spirituelles, les milices angéliques qui chantent l'hymne du triple sanctus: «Saint, Saint, Saint le Seigneur Dieu Sabbaoth, le ciel et la terre sont remplis de ta gloire ... » Quand mon esprit est plongé dans la contemplation, mon coeur se consume d'amour pour Jésus et avec Paul je m'écrie: «Je vis, non pas moi, c'est le Christ qui vit en moi». Quand après cette contemplation je reviens à moi, mon coeur continue à brûler d'amour pour notre Sauveur, mes yeux de répandre des torrents de larmes, tant est grand mon désir de Jésus.


Puis je considère ma petitesse, et je comprends, bouleversée, l'amour infini du Père Céleste pour l'homme la créature de ses mains; j'incline alors ma tête, croise mes mains, et dis: «Que suis-je moi, pauvre indigente? quel bien ai-je fait pour que le Seigneur me visite? aucun. Oh! Seigneur plein de miséricorde. Oh! Bien suprême! Oh ! Amour céleste! Oh ! Père céleste. Que ton Nom tout saint soit béni, car si à moi pauvre et indigente, tu montres tant de bonté, quelle doit être celle que tu montres à tes vrais serviteurs! Et si moi, qui n'ai rien fait de bien, je suis remplie de joie divine, en pensant à ta beauté céleste et divine, quelle doit être la joie, l'allégresse de ceux qui ont vaincu le monde et son prince, et sont allés à toi, porteurs de la couronne de la victoire !»


Et Photinie se tut à nouveau. J'étais bouleversé, mon esprit avait quitté ce monde. Dans le silence, je regardais son visage, il n'était plus un visage humain mais une face d'ange. Après un silence de plusieurs minutes, Photinie me dit:


N'est-il pas temps de chanter Vêpres? Voici, le soleil décline.


Oui, lui dis-je, et nous nous levâmes pour la prière.


Cf. Archimandrite Joachim SPETSIERIS, Sainte Photinie l'Ermite, coll. La Lumière du Thabor, éd. L'Age d'Homme, 1992, p. 57-58.