Starets
saint Silouane

moine
du Mont Athos (1866-1938) dans
"Ecrits" Le
Saint-Esprit apprend à tant aimer les ennemis que l'on aura compassion
d'eux comme de ses propres enfants.
Il
y a des hommes qui souhaitent la damnation et les tourments dans le feu de l'enfer
à leurs ennemis ou aux ennemis de l'Eglise (voir note en fin de page*).
Ils pensent ainsi parce qu'ils n'ont pas appris du Saint-Esprit à aimer
Dieu. Celui qui l'a appris, verse des larmes pour le monde entier.
Tu
dis: « C'est un criminel, qu'il aille donc brûler dans le feu de l'enfer.
»
Mais
je te demande : « Si Dieu te donnait une bonne place dans le Paradis et
que, de là, tu voies dans le feu celui auquel tu as souhaité les
tourments, n'aurais-tu pas alors pitié de lui, quel qu'il soit, même
s'il est un ennemi de l'Eglise? » Ou
bien aurais-tu un cur de fer ? Mais dans le Paradis on n'a pas besoin de
fer. Là, on a besoin de l'humilité et de l'amour du Christ, qui
a compassion de tous.
Celui
qui n'aime pas ses ennemis, n'a pas la grâce de Dieu.
Seigneur, apprends-nous par ton Esprit Saint à aimer nos ennemis et à
prier pour eux avec des larmes.
Seigneur,
répands l'Esprit Saint sur la terre afin que tous les peuples Te connaissent
et apprennent ton amour. Seigneur,
comme Tu as prié pour tes ennemis, ainsi apprends-nous à nous aussi,
par l'Esprit Saint, à aimer nos ennemis.
Seigneur,
tous les peuples sont l'uvre de tes mains; détourne-les de la haine
et du mal vers le repentir pour que, tous, ils connaissent ton amour.
Seigneur,
Tu as donné le commandement d'aimer les ennemis mais cela nous est difficile,
à nous autres pécheurs, si ta grâce n'est pas avec nous.
Seigneur,
répands ta grâce sur la terre ; donne à tous les peuples de
la terre de connaître ton amour, de connaître que Tu nous aimes comme
une mère, et plus qu'une mère : une mère peut oublier son
enfant, mais, Toi, Tu n'oublies jamais, car Tu aimes sans mesure ta créature,
et l'amour ne peut oublier. Seigneur
miséricordieux, dans la richesse de ta bonté, sauve tous les peuples.
Le
Saint-Esprit a fait connaître à notre Eglise les mystères
de Dieu, et elle est forte par sa sainte pensée et par sa patience. L'âme
de l'orthodoxe est instruite par la grâce qui lui apprend à s'attacher
fermement au Seigneur et à sa Très-Pure Mère, et notre esprit
se réjouit en contemplant le Dieu qu'il connaît.
Mais
on ne peut vraiment connaître Dieu que par le Saint-Esprit, et celui qui,
dans son orgueil, prétendrait connaître le Créateur par sa
seule intelligence - celui-là est aveugle et insensé.
Par
notre intelligence nous n'arrivons pas même à saisir comment le soleil
a été créé. Mais lorsque nous demandons à Dieu
de nous dire comment il a fait le soleil, nous recevons clairement dans notre
âme cette réponse: « Humilie-toi, et tu connaîtras non
seulement le soleil, mais encore son Créateur, »
Mais
quand l'âme connaît son Seigneur, de joie, elle oublie le soleil et
toute créature, et abandonne ses soucis de connaissance terrestre.
A
l'âme humble le Seigneur révèle ses mystères.
Durant
toute leur vie, les Saints se sont humiliés et ont lutté cont re
l'orgueil. Moi aussi, je m'humilie jour et nuit, et pourtant je ne suis pas encore
devenu humble comme il le faut ; mais le Saint-Esprit a fait connaître à
mon âme l'humilité du Christ, cette humilité qu'Il nous a
commandé d'apprendre de Lui, et mon âme est sans cesse attirée
vers Lui.
O
humilité du Christ ! Elle donne à l'âme une joie en Dieu impossible
à décrire ; et l'amour de Dieu fait oublier à l'âme
et la terre et le ciel: de tout son désir, elle s'élance vers
Dieu.
O
humilité du Christ ! Comme elle est douce et agréable. Elle ne se
trouve que chez les Anges et dans les âmes saintes ; quant à nous,
nous devons nous considérer comme le pire de tous, et alors le Seigneur
donnera, à nous aussi, de connaître l'humilité du Christ par
le Saint-Esprit.
On
ne peut connaître le Seigneur, sa Gloire et tout ce qui est au ciel que
dans le Saint-Esprit.
Cf.
Ecrits du Starets Silouane, dans Archimandrite Sophrony, Starets Silouane
Moine du Mont Athos, éd. Présence, p. 260-261. Note
: L'expression "ennemis de l'Eglise" doit se situer dans le contexte
précis de l'effroyable déflagration de violence communiste qui a
fait subir à l'Eglise russe orthodoxe un martyr de sang peut-être
jamais connu dans l'histoire de l'humanité.
Silouane témoin direct ou indirect de ces actes insensés
tient à les assumer spirituellement dans une tension mystique où
seul le sentiment de l'amour doit règner dans l'âme affligée.
L'amour des ennemis s'étend donc aux criminels de l'humanité mais
aussi par extension à toutes personnes humaines proches de nous, qui nous
blessent. |